Voyages dans le brouillard

Depuis, bien des choses se sont passées. En 2018, la zone de police EIFEL a fait réaliser une analyse stratégique par la police fédérale (Service de soutien à la politique policière) en matière d’accidents de la circulation. Sur la période triennale 2015-2017, la police de l’Eifel a enregistré 1.109 accidents dans l’Eifel belge, avec 59 blessés graves et 8 décès (3). Ce chiffre est trop élevé. Mais près de 70 ans plus tôt, le bilan était plus drastique dans la région de parution du Grenz-Echo (4). Entre 1947 et 1949, 29 blessés graves et 35 décès ont été déplorés sur les routes. Mais le nombre de véhicules était comparativement très faible : si, par exemple, 0,7 million de voitures étaient immatriculées en Allemagne en 1950, elles sont plus de 45 millions en 2018. Cela signifie qu’en 1950, les voitures particulières ne représentaient que 1,5 % du parc actuel.

Selon l’Office belge des statistiques, le parc automobile de l’actuelle Belgique de l’Est représente, avec 61.550 véhicules (voitures, camions, etc.), un peu plus de 0,83 % du parc motorisé du pays. Pour 1950, Statbel indique un parc automobile national de 273.599 voitures (5). En 1950, le nombre de voitures particulières dans l’ensemble des Cantons de l’Est devait donc être nettement inférieur à 900 véhicules.

Ces chiffres ne nous aident pas seulement à décrire des évolutions. Depuis de nombreuses décennies, il s’agit avant tout de réduire le nombre de blessés graves et de morts dans les accidents.  Pour tous les acteurs de la route. En juillet 1952, sous la présidence du ministre d’État Georges Theunis, naissait Via Secura, une organisation qui devait se consacrer à la formation de tous les usagers de la route (6).

Mais même dix ans plus tard, en juin 1963, le ministre des Transports Alfred Bertrand savait faire le bilan au Sénat et déclarait « qu’il y a quelque chose qui cloche dans la conduite de nos automobilistes » (7). Son projet de loi sur l’introduction du permis de conduire visait l’homme au volant. Promis pour septembre 1964 (8), il a été mis en circulation à partir de février 1967 – sans aucun examen pour la majorité. Seuls les jeunes de 18 à 21 ans devaient passer un examen théorique sur le code de la route.

Pourtant, les observateurs de la circulation ont toujours su que ce permis ne distinguait pas nécessairement que les bons conducteurs.  D’autres facteurs contribuent également à une plus grande sécurité : l’expérience des chauffeurs, l’aptitude des véhicules, le volume du trafic, la législation, les observations et les contrôles du trafic et, bien sûr, les conditions routières et météorologiques. Même le véhicule autonome ne pourra pas empêcher les accidents mortels (9). Et l’homme lui apprendra encore à conduire de nuit et dans le brouillard.