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Les Cantons de l'Est pour les débutants

L’épuration (1945)

30.08.2022
  • Labo
  • Les Cantons de l'Est pour les débutants

Comment l’État belge devait-il traiter les soldats qui avaient combattu pour l’ennemi et tous les citoyens qui s’étaient engagés passivement ou activement pour l’État national-socialiste, ou qui avaient tout simplement suivi le courant (en tant que Mitläufer) ?

Pendant la guerre, l’État belge n’avait pas réagi à l’annexion des Cantons de l’Est par l’Allemagne (1940), qui était contraire au droit international : Il n’avait ni protesté ni reconnu cette situation. Entre-temps, 8.800 hommes des Cantons de l’Est avaient combattu pour l’armée allemande. Parmi eux, 800 s’étaient portés volontaires. Les 8.000 autres furent enrôlés, comme tous les hommes allemands aptes au service. En effet, les citoyens des arrondissements d’Eupen et de Malmedy (aujourd’hui les Cantons de l’Est), redevenus allemands, étaient depuis 1941 des citoyens à part entière du ‘Troisième Reich’, avec tous les droits et devoirs que cela impliquait.

  • Michel_Pauly
    Michel Pauly
Son avis :

Au sujet de la culture mémorielle au Luxembourg :

« De tels débats existent encore aujourd’hui au Luxembourg [...]. Un glissement politique a été provoqué dans ce débat lorsque l’historien luxembourgeois Vincent Artuso a publié en 2015 son rapport sur la collaboration de l’administration luxembourgeoise sous la domination nazie. Il en est ressorti [...] entre autres, que l’administration luxembourgeoise avait activement collaboré avec les nazis, entre autres dans la persécution des juifs. Cela a conduit le Premier ministre luxembourgeois à s’excuser publiquement auprès de la communauté juive luxembourgeoise pour les méfaits de l’État luxembourgeois pendant la Seconde Guerre mondiale. Le ‘Rapport Artuso’ a soulevé à nouveau de vieilles questions passées sous silence et a montré que les événements de la Seconde Guerre mondiale sont loin d’avoir été complètement traités au Luxembourg. »

Après la guerre, le gouvernement voulait juger les Belges des Cantons de l’Est selon les mêmes critères que tous les Belges, même si les conditions de vie entre la zone frontalière annexée et la Belgique occupée avaient été très différentes. Cela a conduit à ce que l’on appelle l’épuration.

Ce terme désigne une véritable hystérie de l’épuration qui s’est développée en Belgique à partir de l’été 1944. Au départ, il s’agissait d’efforts bien intentionnés visant à dénazifier le pays et à punir les collaborateurs. Cependant, il serait inapproprié d’utiliser le terme « dénazification » pour décrire l’épuration. Pourquoi ?

Voici quelques faits : Une fois la guerre terminée, de nombreux soldats des Cantons de l’Est ont d’abord été faits prisonniers de guerre et, après leur libération, ils ont été envoyés dans les prisons belges. En 1946, environ 63.000 personnes vivaient dans les Cantons de l’Est. 6.000 à 7.000 citoyens furent internés, environ 18.000 dossiers judiciaires furent ouverts et 3.201 citoyens furent inculpés. 1.503 Citoyens de l’Est ont été condamnés. Des milliers de personnes furent temporairement privées de leurs droits civiques. En 1946, près de 50 % du corps électoral était exclu des élections. 461 personnes furent déchues de leur citoyenneté.

  • Claudia Kühnen_Aachen
    Claudia Kühnen
Son avis :

À propos de la mémoire de la dénazification allemande :

« Ce n’est effectivement que dans les années 60 [...] que cela est devenu un sujet de discussion dans la société allemande. Aujourd’hui, la plupart des gens s’accordent à dire que la dénazification n’a pas réussi – de nombreux titulaires de postes très prestigieux comme des juges ou autres ont été réintégrés après la guerre et n’ont jamais été punis pour leurs actes. Le fait que de nombreux scientifiques et médecins aient été recrutés par les États-Unis et qu’ils n’aient pas été justement punis contribue également à cette impression. La question des peines justes et de la culpabilité reste néanmoins un sujet d’actualité. »

Il ne fait aucun doute qu’il fallait punir ceux qui s’étaient clairement prononcés en faveur du national-socialisme et qui avaient violé des droits universels tels que les droits de l’homme. Mais c’est toute une population qui a été soupçonnée de ne pas avoir respecté, en tant que citoyens du ‘Troisième Reich’, les lois qui s’appliquaient à la Belgique occupée.

Dans la culture mémorielle, les gens se sentaient à nouveau victimes. Une approche différenciée de cette partie de l’histoire n’a pas eu lieu et l’épuration est restée un sujet tabou jusque dans les années 1990.

  • Adeline_Moons
    Adeline Moons
  • Jeroen Petit
Leur avis :

« Ce débat a certainement existé en Flandre après la Seconde Guerre mondiale. Il y a également eu après la guerre un mouvement en faveur d’une amnistie pour les collaborateurs. En 1961, une réglementation a également été adoptée, qui prévoyait que les collaborateurs pouvaient être réhabilités dans certaines circonstances. Cependant, les discussions intensives sur le bien-fondé ou le mal-fondé de la collaboration ne se déroulaient qu’en coulisses. Un débat public à ce sujet n’était pas possible. L’une des raisons en était la charge émotionnelle des débats, entre autres parce que l’Holocauste n’était et n’est toujours pas traité en Belgique. De plus, la discussion porte souvent exclusivement sur le mouvement flamand. Il y a souvent peu de place pour les autres aspects de la collaboration en Flandre. La collaboration en Flandre était en effet bien plus que la collaboration militaire. Il y a également eu une collaboration économique. Le rôle des femmes et des enfants flamands de soldats allemands de la Wehrmacht joue également un rôle. Beaucoup de ces personnes ont été mises dans le même sac après la Seconde Guerre mondiale, lors des vagues d’épuration. »